Là aussi, je voulais partager avec vous une lecture concernant ce post "sommeil" qui nous interroge toutes quand les infos "classiques" ne correspondent pas à la réalité de notre vécu.
Extrait du livre :
Pour une parentalité sans violence
de Claude-Suzanne Didierjean-Jouveau
Jouvence Editions
4.90 euros !
Chapitre : Comment dorment les bébés
Quand chez nous (en France), on devient parent pour la première fois, on a généralement qu'une idée très vague des besoins d'un bébé et des meilleures façon d'y répondre.
C'est particulièrement vrai pour tout ce qui concerne le sommeil, où des attentes souvent irréalistes engendrent inquiétudes (mon enfant a-t-il un problème de sommeil ?), fatigue, rancoeurs (cet enfant m'épuise), envie de dressage, etc.
Aussi n'est-il pas inutile de donner d'abord quelques faits, fondés sur la physiologie de l'observation.
Quelques faits en vrac
On a déjà dit que le petit d'homme naît prématuré si on le compare à l'état d"'achèvement" de beaucoup d'autres petits de mammifères. Cet "inachèvement" est notamment vrai pour le sommeil, qui va peu à peu s'organiser au cours des mois et des années.
À la naissance, les cycles de sommeil sont beaucoup plus courts que chez l'adulte : 50 mn contre 90 mn. Ils vont petit à petit s'allonger jusqu'à l'adolescence. En phase de sommeil paradoxal (= "sommeil agité" chez les nouveau-nés), le réveil est difficile chez l'adulte, facile chez l'enfant.
Comme le dit le Dr Françoise Delormas, « connaître les cycles permet d'accepter les rythmes de sommeil et d'éveil chez les tout-petits sans dramatiser : leurs cycles sont plus courts que les nôtres, dans un sommeil encore fragile, mal structuré. À chaque fois qu'ils passent d'un cycle à un autre, ils peuvent se réveiller : ils babillent ou restent tranquillement les yeux ouverts, ou pleurent. »
Avant 3 mois, il n'y a pas d'organisation circadienne (= sur 24 heures). Après 3 mois, l'influence circadienne augmente, les périodes de sommeil stable s'allongent pendant la nuit, le "sommeil agité" diminue dans la journée. Mais l'organisation circadienne n'est pas terminée avant 2 ans.
La proportion d'enfants qui recommencent à se réveiller la nuit augmente après 9 mois pour être à son maximum dans la deuxième année. À 3 ans, 20 à 35% des enfants se réveillent encore la nuit et cela diminue jusqu'à 5 ans (Dr Nédelcoux du Service d'explorations fonctionnelles du système nerveux au CHU de Bicêtre, 1995). D'après le Dr Jalin (consultation des troubles du sommeil à l'hôpital St Vincent de Paul), les chiffres seraient même plus importants : entre 2 et 3 ans, 60% des enfants se réveilleraient au moins une fois par nuit, mais seuls 5% auraient un vrai trouble du sommeil (Que Choisir, janvier 1991). Une toute récente enquête, conduite à Lyon sur 147 enfants de moins de 18 mois, montre que 65% se sont réveillés dans la nuit et ont gardé les yeux ouverts pendant plus de 20 minutes.
Une étude finlandaise portant sur 270 bébés âgés de 0 à 12 mois, avait donné les résultats suivants en 1990 :
– jusqu'à 3 mois, les bébés dormaient un total de 15 h en moyenne (fourchette de 12 à 20 h), 90% se réveillaient au moins une ou deux fois par nuit,
– de 3 à 5 mois, près des trois-quarts se réveillaient une ou deux fois,
– de 6 à 8 mois, les deux-tiers se réveillaient une ou deux fois,
– de 9 à 12 mois, 47% se réveillaient une ou deux fois.
Il est normal pour le bébé de se réveiller la nuit
Face à cette accumulation de chiffres, on peut légitimement se poser la question : si tant de bébés se réveillent la nuit, n'est-ce pas parce que cela répond à un besoin physiologique ?
C'est ce que pense l'anthropologue américain James J. McKenna, qui étudie le sommeil des bébés dans son laboratoire depuis de nombreuses années, et relie ces réveils à l'immaturité du petit humain à la naissance .
Cette immaturité porte sur tous les organes et systèmes, et notamment sur le cerveau. Pour McKenna, la médecine et la société occidentales modernes considèrent que les bébés sont physiologiquement autonomes à un âge où ils ne le sont en fait pas encore, et où ils ont toujours besoin d'être "assistés" par la proximité de l'adulte.
Chez le bébé, les mécanismes d'éveil ne sont pas encore au point. Or l'on sait que la mort subite du nourrisson (MSN) traduit entre autres une déficience de la capacité à se réveiller. Les réveils nocturnes seraient donc un facteur de protection contre la MSN. Quand le bébé dort seul, il a plus de sommeil profond (phases 3 et 4), pendant lequel il lui est plus difficile de se réveiller lorsque survient une apnée potentiellement mortelle.
Sur un autre plan, il est particulièrement simpliste de décréter, comme le font tant d"'experts" sur le sujet, qu'au-delà de 8 semaines et un poids de 5 kg, les bébés ont des réserves énergétiques suffisantes pour "tenir" toute la nuit sans manger, et qu'il est donc temps de commencer le dressage si l'enfant ne "fait" pas encore ses nuits : les réveils nocturnes ne servent pas qu'à assouvir la faim.
Robert Wright, quant à lui, explique ces réveils de façon très imagée : « Peut-être bien que le cerveau des bébés a été façonné par des millions d'années de sélection naturelle où les mères dormaient avec leurs bébés. Peut-être bien qu'autrefois, si un bébé se retrouvait tout seul la nuit, c'était souvent très mauvais signe (la mère avait pu être dévorée par une bête sauvage, par exemple). Peut-être bien que le cerveau des tout-petits est programmé pour réagir à cette situation en hurlant, de sorte que toute personne proche l'entende et puisse le trouver. Bref, peut-être bien que si les enfants laissés seuls semblent terrifiés, c'est tout simplement parce qu'ils sont vraiment terrifiés. » (Time, 14/04/97).
Paragraphes suivants :
Le sommeil partagé
Endormissement et rendormissement
Jusqu'à quand